Un “répit” avant l'austérité ?

Des textes budgétaires 2024 en-deçà des besoins de la population et qui présagent d’une fin de quinquennat particulièrement contrainte

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Alors que les dépenses des établissements de santé en 2023 ont excédé de 1,8 Md€ la cible budgétaire qui avait alors été fixée, le PLFSS 2024 propose une progression de l’ONDAM établissements de santé de 3,2 %, soit un demi-point inférieure à l’ONDAM 2023. Une fois retranchée l’inflation, l’enveloppe budgétaire allouée aux établissements de santé ne progresserait que, dans une prévision optimiste, de 0,61 Md€, soit d’un montant inférieur aux évolutions prévisibles de dépenses et notamment aux 1,7 Md€ nécessaires pour couvrir les hausses de rémunération des soignants d’ores et déjà annoncées par le gouvernement. À activité égale, on estime donc à 1,5 à 2,5 Md€ l’insuffisance de financement de l’hôpital public en 2024 (cf. annexe 1).

Le projet 2024 prévoit des mesures de contrôle drastiques mais ciblées sur des arrêts courts dont le montant total est faible (18 % des dépenses totales relatives aux indemnités journalières) et sans prendre en compte les enjeux de prévention, voire risquant de la complexifier. C’est pourtant sur les arrêts longs que le risque humain est le plus élevé et que se concentre la hausse, ce qui devrait conduire à s’interroger sur les pathologies de la sphère psychiques induites ou aggravées par des conditions de travail dégradées. Une augmentation des arrêts longs pour des troubles musculo-squelettiques est par ailleurs attendue dans les prochaines années, a fortiori dans un contexte de relèvement de l’âge légal de départ à la retraite (cf. annexe 2).

Si l’institut I4CE estimait en octobre 2022 à 12 milliards d’euros par an les dépenses d’investissement des collectivités territoriales nécessaires en matière de mobilité, de rénovation thermique des bâtiments, l’efficacité énergétique de l’éclairage public et de réseaux urbains de chaleur, le PLF 2024 propose un abondement du “Fond vert” pour l’investissement écologique des collectivités de 500 M€, ainsi porté à 2,5 Md€, tous secteurs confondus (cf. annexe 3).

De manière générale, et bien que l’idée d’une contrainte sur les dépenses des collectivités territoriales ait été abandonnée, ces dernières se voient assigner un objectif de réduction de 0,5 % de leurs dépenses de fonctionnement, en volume, chaque année à partir de 2024 (cf. annexe 4).

Enfin, alors que le PLF affiche une hausse de 2 % du plafond d’emplois sur la mission enseignement scolaire et une “hausse historique” de ce budget, ces hausses sont en réalité assez largement contrastées. L’augmentation du plafond d’emploi n’est en réalité que de 0,15 %, les 1,85 % restants étant dus à une bascule entre lignes budgétaires de postes d’AESH déjà pourvus au sein de l’éducation nationale. Cette hausse masque également le choix de supprimer 2 700 postes d’enseignants sur l’année à venir, à la faveur de la diminution du nombre d’élèves, mais au risque d’aggraver les conditions de travail et la crise d’attractivité du métier (cf. annexe 5).

Une désocialisation délibérée via le déremboursement des soins dentaires pour faire des économies. La baisse de la prise en charge des soins dentaires par l’Assurance maladie pour une économie de 500 M€ annuels (voir annexe 6), qui devrait contribuer à alimenter la hausse de la contribution des ménages, laquelle peut être estimée entre 6 et 8,5M€ par an entre 2019 et 2024.

Élément risquant d’accentuer les conséquences des choix budgétaires pour la population, le PLF 2024 propose la fin des mesures de soutien aux ménages notamment face à la hausse du prix de l’énergie, tablant sur une hausse des salaires. Pour rappel, selon la publication France portrait social, les mesures de 2020 et 2021 prises ensemble ont un effet quasi neutre sur le taux de pauvreté (+ 0,1 point). Sans les versements exceptionnels, les mesures de 2020 et 2021 auraient augmenté le taux de pauvreté de 0,3 point. On peut s’attendre à ce qu’en 2022 la lutte contre la pauvreté passe encore davantage par ces mesures exceptionnelles : la non reconduction de ces mesures exceptionnelles à partir de 2023 signifie un ralentissement de la lutte contre la pauvreté (cf. annexe 7).